Hommage

Comment  peut-on oublier Gökşin ??

Nous avons tous une histoire avec lui…

Racontez-nous vos anecdotes, nous essaierons d’en faire un livre.

Merci

2 commentaires

  1. LAURENCE GUILLAIN

    Lors d’une petite interview amateur, mon parcours se résume comme cela… à l’âge de 6 ans j’étais chez SIPA, rue de Berry si mes souvenirs sont bons, c’est mon premier souvenir de Goksin, et là j’ai su que ma vie serait liée à la photo.
    Et Goksin avait vu comme les photos me fascinaient, grâce à lui j’ai eu mon premier appareil, que j’ai toujours, un instamatic Kodak. J’étais haute comme ses piles de photos, ses piles de planches de diapos, de tirages, et de journaux. Cela m’a marquée, je me sentais comme dans un labyrinthe, il n’y avait pas de place (à mes yeux, pour l’enfant que j’étais), j’étais collée aux photos, et il ne fallait pas trop y toucher, les piles risquaient de tomber… et j’aurai voulu rester là près de lui à découvrir des milliers, des millions d’images. Je me souviens quand il a dit à mes parents qu’il fallait me donner un appareil photo, j’avais du mal à lâcher les siennes… du moins celles présentes dans son agence.
    En fait j’étais celle que l’on prenais en photo, j’étais une petite fille célèbre, en partie grâce à Goksin, puisqu’il assurai la promotion des livres de mes parents, où ils racontaient leur vie, ma vie, sur un (des) voiliers, autour du monde, école à bord… Faire rêver était lucratif et je devais m’y appliquer. Ma vraie vie est loin d’avoir été un rêve.
    Goksin était l’ami de mes parents, en tous cas Goksin aimait mes parents, et à aidé ma mère… en cas de problème il y avait Goksin. Nous n’avions que très très peu de contacts familiaux, mes deux parents s’étant fâchés avec les leurs, et Goksin est devenu pour moi un repère, mieux qu’un père, un jeune grand-père bienveillant, je le voyais solide comme un roc, sa présence était rassurante même si nous étions au bout du monde. Goksin a énormément aider mes parents, je savait qu’il était notre sauveur, que bien souvent je lui devait ma pitance, voire notre salut. Sauf que, je n’ai jamais su vraiment pourquoi, un jour ma mère est revenue fâchée d’avec Goksin.
    En fait, j’étais très myope, et les photos me permettaient de découvrir ce qui échappait à mon regard, un monde net. Car cette vie hors norme, sans aller à l’école, sans médecins ou presque, faisait que je n’avait pas de lunettes malgré ma très forte myopie. Avec mon instamatic j’ai eu 3 bobines, 12 vues chacune je crois, et je me suis empressée de faire des photos. Je photographiai mes petites soeurs, et les habillaient, les faisait poser en les embêtant un peu, je savait que j’avais peu de pellicules, je m’appliquai beaucoup avant de déclancher. Après ces trois bobines, je n’en ai plus jamais eu, c’était trop cher pour mes parents. Mais quand je les ai reçues développées, 6 mois plus tard, les délais postaux sont très longs sur un voilier… j’ai découvert émerveillée le paysage qui se trouvait derrière mes petites soeurs sur mes photos, et j’ai déclaré avec une conviction qui ne m’a jamais quittée, « quand je serai grande je travaillerai dans la photo ». Voilà, Après encore bien des péripéties, depuis l’âge de 22 ans je travaille dans la photo.
    Goksin était au départ un ami de mes parents, et moi de longue date j’étais fâchée avec eux. Alors je n’avais jamais été voir Goksin. D’autant que, je voulais être le contraire de mes parents, ne profiter de personne. Alors j’ai fait mon bout de chemin, après bien des galères, j’avais malgré tout trouvé un travail dans la photo rentrée comme documentaliste chez Explorer, et puis mue par ma passion 4 ans plus tard je suis devenue agent de photographe, voire un peu plus, une micro agence, et mes correspondants espagnols m’ont invitée sur leur stand à Visa pour l’Image à Perpignan. Alors là j’étais dans le chaudron. Et je décrochais des rendez-vous extraordinaires, des commandes folles, pendant le festival Visa pour l’Image. A la fin du festival, à l’époque nous étions moins nombreux, et le dernier soir nous étions tous invités à diner à table quand l’ami qui m’avait fait venir me dit… « tu connais ce monsieur? Ecoute, il est en train de parler de toi… » « bien-sûr je le connais…mais?? » Et voilà qu’on m’exhorte à m’approcher de lui et qu’il me présente à la profession, me recommande auprès de tous… J’étais épouvantablement timide et malgré toute l’énergie que je mettais dans mon aventure, cachée derrière mes coquillages, je me sentais indigne d’un pareil soutient, j’ai alors dis « non, non Goksin »… et je me suis sauvée…je l’ai peut-être même vexé, moi au lieu de profiter de son cadeau, je voulais me cacher dans un trou de souris. Goksin m’y avait observée, avait dû prendre ses renseignements aussi. Il aurai aimé que je travailles avec lui, pour lui. Mais moi, je n’ai jamais voulu ternir l’image qu’il se faisait de mes parents, et me connaitre mieux c’était le découvrir. Et puis je ne réalisais pas qu’il était autre chose que l’ami de mes parents, qu’il avait le pouvoir de me faire toucher mes rêves.
    Et il n’a jamais su à quel point il m’avait touchée.
    Mais dès lors il m’a eu à l’œil, j’étais sur son terrain. Et son regard bienveillant me faisait un bien immense, cet homme était capable de tout donner avec ses yeux.
    Même quand quelques années plus tard, mon cv avait atterri sur son bureau, via l’ANI, il m’avait appelée furieux « Comment? Tu cherches du travail et tu ne viens pas me voir??? Tu viens ici tout de suite ! Je t’attends demains matin à 9h dans mon bureau !! Euh oui, d’accord… impossible d’en placer une de toutes façons. A vrai dire je ne pouvais imaginer qu’on se préoccupe de moi, et ce qui a suivit. Et puis c’était d’abord l’ami de mes parents. Je suis allée le voir tout de suite comme il me l’a ordonné au téléphone.
    J’y étais donc le lendemain. J’avais eu des déboires, et je tentait de cacher ma misère… « Tu crois que je ne vois pas???  » Ce jour là j’ai commencé à me sentir un peu moins seule sur Terre. Il me secourait, en prenant garde de ne pas me le faire sentir, j’allais lui apporter quelque chose… Il avait ce don de rendre l’autre important, un regard qui faisait redresser la tête, et je voulais en être digne, qu’il soit fier de moi. Nous partagions tellement, il y a tellement tellement de choses que je n’ai jamais oser lui dire, j’avais l’impression que ternir l’image de mes parents serait un sacrilège pour lui, aujourd’hui je sais que j’ai eu tors, trop tard. Tellement d’échanges autour de notre passion, des métiers du photojournalisme que nous n’avons eu qu’au travers de regards, mais des vrais, lourds de sens, de très peu de mots, et de silences, tout aussi lourds de sens. Toujours son regard me suivra, que dirait-il de cela, qu’aurait-il fait, oui, des faits, pas des paroles en l’air. On se comprenait bien, des yeux, et des faits, pas de bavardages superflus, si on avait parlé comme je l’espérai tant, on serait allé à l’essentiel. Mes parents, ma générosité à moi envers Goksin, c’était de ne pas lui dire combien mes parents ont été de mauvais parents, même s’il l’a sans doute un peu compris tout seul. Il aurait voulu que je l’aide à renouer avec ma mère, mais je n’en avais absolument pas le pouvoir. Et je ne savais pas comment le lui dire, sans écorner l’image qu’il avait d’elle. Alors je disais juste, « je ne peux pas, oui, je sais Goksin, .. » et j’aurais voulu savoir ce qu’il pensait, j’aurais tellement voulu prendre le temps de parler avec lui. Si discrète Phyllis, me diras-tu ce qu’il pensait? Il n’a jamais su que depuis mes six ans je voulais travailler dans la photo. Voire être photographe, peut-être. Il n’a jamais su que j’ai depuis petite les mêmes velléités de montrer, dénoncer, … Il n’a jamais su tout ce qu’il y à a dénoncer dans mon enfance. Et ma jeunesse. Mais il a vu et senti beaucoup de choses me concernant, et nos yeux se disaient plein de choses, je crois, j’espère. Je sais que s’il avait su, ma vie aurait pu être bien différente. Je serais sans doute devenue photographe pour lui… Si j’avais su moi aussi, plus tôt, que je pouvais aller le voir… Le jour où il est parti, j’ai été dévastée, et ma vie à basculer, vraiment. Il était tellement pour moi qu’il m’est bien difficile de vous le dire. C’est bon d’avoir écrit tout cela quand même.

  2. jacques CIMORRA

    J’ai lu quelque part qu’il avait dit quelque chose comme ça :
    « L’important n’est pas dans ce que tu as fait, mais dans ce que tu as permis aux autres de faire. »
    Chacun de nous devrait méditer cette phrase, chaque jour, à chaque instant de sa vie.

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